Par Christophe Dordain
Un homme vêtu de bleu pénètre dans le saloon d'une petite bourgade américaine au son d'une musique mystérieuse. L'endroit est désert. Soudainement, surgissant de nulle part, trois malfrats aux mines patibulaires lui tombent dessus. Malheur à eux ! En moins de temps qu'il ne faut pour le dire, ou plutôt l'écrire, ils sont expédiés au tapis. Le tout sans avoir oublié de casser tout le mobilier disponible (chaises, tables, fenêtres, portes, balustrades, etc.).
Ce type de scène d'action (dans une série télévisée des années 1960) dénotait manifestement des productions habituelles. En effet, dans le cadre strict de ces dernières, les acteurs principaux, à l'invitation des compagnies d'assurances, se faisaient doubler par des cascadeurs chevronnés. Toutefois, avec "Les Mystères de l'Ouest", et son acteur principal Robert Conrad, il n'en fut pas question ! Tant il est vrai que ce dernier prenait un malin plaisir à participer à ces séquences de bagarre (il y en eut dit-on 393 contre 940 adversaires sur un total de 104 épisodes. Un record toujours à battre ? Peut être...). En somme, des séquences hautement jouissives qui ont marqué à tout jamais l'imaginaire de toute une génération de téléspectateurs. Et en particulier l'auteur de ces modestes lignes que vous vous apprêtez à lire. C'était alors le bon vieux temps de "La Une est à Vous"...
PREAMBULE
Décédé le 08 Février 2020, Robert Conrad, de son vrai nom Conrad Robert Falk, était né le 01 mars 1935 à Chicago dans un quartier pauvre. Un endroit où il dû apprendre très tôt à se battre pour survivre. Ceci l'amènera tout naturellement vers la boxe. Il monte sur les rings dès l'âge de 16 ans. Ainsi, participe-t-il à une dizaine de combats. Il faut souligner que ces derniers lui apportent un lot de blessures suffisamment graves pour l'empêcher de continuer la pratique du noble art.
Les premiers pas
A partir de 1954, Robert Conrad décide de se lancer dans la comédie. Le théâtre de Chicago l'engage pour quelques rôles insignifiants. Des prestations mettant davantage en avant son physique que ses talents de comédien. Plutôt déçu par son premier contact avec les planches, il choisit alors de quitter l'Etat de l'Illinois pour celui de la Californie. Voici un choix qui s'avèrera judicieux à un moment, où, l'industrie du cinéma connaît de profonds bouleversements. En effet, l'introduction de la petite lucarne magique qu'est la télévision dans les foyers américains avait remis en cause les grands équilibres des studios de cinéma. Ces derniers, plutôt que de dénigrer ce nouveau média, décident, au contraire, de l'abreuver en programmes spécifiquement adaptés. C'est l'âge d'or premier des séries télévisées.
Dans ce cadre, à la fin des années 1950, Robert Conrad intègre les studios de la firme Warner Bros. Elle lui propose quelques prestations dans des séries télévisées telles que "Maverick" (avec James Garner) et "Colt 45" ainsi que "77 Sunset Strip". A ce sujet, précisons que l'acteur Nick Adams aura beaucoup fait pour le démarrage de la carrière de Conrad. Vedette de la série "The Rebel" (diffusée de 1959 à 1962), il lui a prodigué de nombreux conseils. Ce qui lui a permis d'obtenir son premier engagement.
DIRECTION LES PLAGES D'HAWAII
Et voici Tom Lopaka
1959 est l'année du premier succès pour le jeune Robert Conrad. En effet, un quatuor de producteurs (formé par William T. Orr, Stanley Niss, Charles Hoffman et Ed Jurist) travaille à l'époque sur un concept inédit. Mettre en scène un duo de policiers. Un duo dirigeant une agence de détectives privés à Hawaï. L'aspect novateur de ce programme résidant dans le fait que la production de la série devait permettre d'utiliser le cadre paradisiaque d'Honolulu comme arrière-plan de chacun des épisodes. Toutefois, le tournage, lui, avait bien lieu dans les studios Warner à Los Angeles.
On peut alors remarquer que cette série va ouvrir le chemin à d'autres. Car cette idée sera reprise ultérieurement pour des programmes tels que "Hawaï Police d'Etat" (avec Jack Lord et qui sera la première série tournée sur place) et "Magnum" (avec Tom Selleck). Robert Conrad devient ainsi le partenaire d'Anthony Eisley dans "The Hawaiian Eye" (traduit par "Intrigues à Hawaï" lors de la diffusion de la série sur RTL dans les années 60/70). Il y tient le rôle de Tom Jefferson Lopaka.
Un premier grand succès
Diffusé pour la première fois le 07 octobre 1959, ce show, à l'action soutenue, tiendra l'antenne pendant quatre ans (avec un total de 134 épisodes proposés jusqu'au 04 février 1963). Voilà un programme auquel aurait dû s'intéresser les chaînes françaises depuis fort longtemps ! Il paraît qu'au moins 26 épisodes doublés, peut-être plus, seraient disponibles dans les cartons de certains programmateurs français. Car la série fut notamment diffusée par RTL Télévision dans les années 60/70...
UN AGENT SECRET DANS L'OUEST
En 1964, Robert Conrad se présente au casting d'une nouvelle série au concept délirant. En effet, elle s'inscrit pleinement dans le contexte "James Bond mania" typique du milieu des années 1960. A l'origine de cette série-culte, un producteur majeur de l'industrie hollywoodienne : Michael Garrison. Ce dernier commence sa carrière à Hollywood comme acteur. Puis, il devient très vite producteur associé. Ainsi, travaille-t-il sur plusieurs films célèbres tels que "Peyton Place" ou "The Long Hot Summer". Il est à noter que ces deux films furent adaptés à la télévision (le second permettant notamment le démarrage de la carrière d'un certain Roy Thinnes, en 1963). Rappelons aussi que déjà, en 1956, Michael Garrison, et son associé Gregory Ratoff, avaient tenté d'adapter le roman de Ian Fleming, "Casino Royale", pour le cinéma. Une entreprise qui demeurera sans succès...
Le temps de la sélection
En compagnie de Hunt Stromberg Jr, (directeur des programmes de CBS Televison) et d'Ethel Winant (chargée du développement des programmes du même network), Michael Garrison imagine les aventures d'une sorte de James Bond dans l'Ouest. Le pilote de la série est écrit par Gil Ralston. Ce dernier conçoit quelques uns des gadgets qui vont faire toute l'originalité de la série. Robert Conrad y incarne, avec talent et prestance, James West. Il est donc un agent secret dépendant directement du Président Grant.
West est aidé par un associé nommé Artemus Gordon. Celui-ci, dans la première saison 1965/1966, a plus un rôle de faire-valoir que d'alter ego. A sa demande, son personnage va alors s'étoffer lors des trois saisons suivantes pour le plus grand bonheur de tous les fans de la série. Pour Robert Conrad, le casting ne fut pas chose facile. En compétition avec John Derek, Skip Ward ou Rory Calhoun, le jeune acteur (il alors 30 ans) décroche le rôle-titre grâce à sa séduction naturelle. Plus ses capacités physiques largement au-dessus de la moyenne qui vont pouvoir pleinement s'exprimer dans "Les Mystères de l'Ouest".
Un duo incomparable
Le 16 décembre 1964 débute le tournage de l'épisode-pilote sous la direction de Richard Sarafian. Onze jours et demi seront nécessaires, dans un climat parfois tendu. Ceci pour deux raisons. Tout d'abord, parce que beaucoup d'éléments nouveaux étaient testés pour s'intégrer dans le concept final du show. Ensuite, les relations entre Robert Conrad et Ross Martin n'étaient pas des meilleures. Fort heureusement, avec le temps, les deux comédiens finiront par admettre que leur relation devait être symbiotique. Pour le plus grand profit de la série.
Les saisons III et IV (programmées de 1967 à 1969) démontrent parfaitement cette réalité. En effet, le duo y fonctionnant à plein régime. En fait, Robert Conrad ne cachait pas son admiration pour les talents de comédie de Ross Martin. Ce dernier étant, lui, admiratif des formidables capacités de cascadeur de Robert Conrad.
Une authentique série-culte
"Les Mystères de l'Ouest" commencent leur diffusion le 17 septembre 1965 et le succès est au rendez-vous. Ce programme, longtemps dénigré par les revues dites spécialisées en France, est enfin considéré depuis plusieurs années, et à juste titre, comme un monument d'originalité et d'invention. Notamment grâce à l'atmosphère mystérieuse qui se dégage de chaque épisode. Mais aussi par le soin apporté à la réalisation avec la participation de téléastes chevronnés. Citons entre autres Richard Donner, Alan Crosland Jr, Marvin J. Chomsky, Robert Sparr, Paul Stanley, Gunnar Hellström, Alex Nicol, Mike Moder et James B.Clark. Et puis, il y a la cas particulier d'Irving J.Moore, auteur de 24 épisodes.
Ajoutons à cela l'extraordinaire performance des méchants de service (Miguelito Loveless étant le plus brillant et le plus maléfique), les partitions musicales signées Richard Markowitz, Morton Stevens, Robert Drasnin, Jack Pleis ou Richard Shores... Tout ces talents réunis ont concouru à la qualité unique et inégalée du show.
Bagarres en série
Sans oublier l'ingrédient magique. Ce fabuleux petit plus fascinant qui laissait tous les gamins de l'époque béats d'admiration : les bagarres ! Ah, les samedis après-midi des années 1970 en France ! A l'époque de "La Une est à Vous", présentée par Bernard Golay ! Quatre heures et plus encore de programmes entièrement dédiées aux séries TV ! Et ces éléments si importants à l'époque. Tout d'abord, l'épisode d'ouverture. Puis, le vote des téléspectateurs. Enfin, l'obligation de patienter généralement jusque 17 heures environ avant que n'arrive le moment tant attendu. L'instant béni quand, avec un brin de malice dans le regard, et généralement une majorité des appels téléphoniques en faveur de la série, Bernard Golay annonçait la diffusion d'un nouvel épisode des "Mystères de l'Ouest" !
Pour toute une génération de gosses (dont l'auteur de ce portrait) arrivait alors la sacro-sainte récompense, après une semaine bien trop longue : les bagarres à la James West ! Et, sous nos yeux fascinés, les méchants valdinguaient à travers les portes qui elles-mêmes volaient en éclats ! Ou bien ils tombaient dans les escaliers dans d'infernales culbutes ! Ou bien encore passaient au travers des fenêtres, etc. Quant à James West, il s'en sortait toujours. Même à un contre dix !
A ce sujet, nous recommandons aux lectrices et lecteurs trois épisodes particulièrement éloquents quant à la qualité et/ou l'aspect spectaculaire, voire un peu fou, des scènes d'action dans "Les Mystères de l'Ouest". Tout d'abord, le numéro 51 : "La nuit des Tireurs d'Elite"; ensuite le numéro 88 : "La nuit du sarcophage"; enfin le numéro 90 : "La nuit de l'oeil-mémoire".
Coordonnées par Withey Hughes, mais hautement supervisées par Robert Conrad, les scènes de combat des "Mystères de l'Ouest" sont devenues des modèles de référence et jamais, aucune autre série, n'est parvenue à développer ce type de scènes d'action à une telle échelle. Jerry Summers, Chuck O'Brien, Bill Couch, Dick Cangey, Jerry Laveroni, Tom Huff, Fred Stromsoe, Jack Williams, Red West, Lou Elias, Bill Catching, Bob Herron, Jimmy George et tant d'autres méritent tous nos remerciements pour ces purs moments de bonheur télévisuel.
Une surprenant annulation
Quant à Robert Conrad, il est à tout jamais l'acteur-cascadeur le plus efficace et le plus populaire de la télévision. Personne, vous disais-je, n'a pu, depuis, égaler ses performances. Certainement pas Will Smith dans cette honteuse adaptation de la série, signée par Barry Sonnenfeld. Adaptation, en réalité trahison, qui ne mérite que notre incompréhension pour ne pas dire notre mépris.
Cependant, c'est à cause de ses scènes d'action (jugées trop violentes, quelle mauvaise blague !), que la série est annulée en avril 1969, après 104 épisodes, tous ou presque d'égale qualité. Alors, on ne peut que rester pantois devant une telle décision. Avec une mention particulière pour Frank Stanton (le président de CBS Television). En effet, ce dernier n'aura pas laissé l'opportunité au producteur Bruce Lansbury de conclure la série par une saison finale qui aurait pu se muer en une sorte d'apothéose.
DE JAKE WEBSTER A THOMAS REMINGTON SLOANE
Alors, pour Robert Conrad, l'entame des années 70 consiste tout d'abord à participer à des séries en tant qu'invité-vedette notamment dans "Mannix" et "Mission Impossible". Puis, c'est en 1971 que débute la diffusion d'une nouvelle série le mettant en vedette : "The D.A.", ce qui signifie District Attorney (l'équivalent du Procureur de la République dans le système judiciaire français).
Place à l'univers de la justice
Qu'un acteur de télévision n'ait pas à son palmarès un programme dont l'action se déroule dans l'univers judiciaire est chose rare aux Etats-Unis, Conrad ne fait pas exception à la règle. En fait, ce show est un spin-off (ou série-dérivée) d'une autre série, "Adam 12", produite par Herman S. Saunders et Tom Williams, et qui fut diffusée sur NBC de 1968 à 1975. Dans "The D.A.", Robert Conrad tient le rôle de Paul Ryan, le District Attorney, qui se charge de la mise en accusation des prévenus arrêtés par les officiers Pete Malloy et Jim Reed (interprétés par Martin Milner et Kent Mc Cord).
Il faut souligner ici que le personnage de Paul Ryan avait obtenu suffisamment de succès auprès du public lors d'épisodes diffusés dans le cadre de la série "Adam 12", pour que les producteurs envisagent d'en faire un héros à part entière. C'est pourquoi 13 épisodes, produits par Jack Webb, sont proposés du 17 septembre 1971 au 01 janvier 1972. Les taux d'écoute ne furent malheureusement pas satisfaisants, et d'ailleurs cette série n'a jamais été diffusée en France. Chose regrettable...
Héros en série
En 1972, Robert Conrad tourne dans le téléfilm "Les Aventures de Nick Carter" sous la direction de Marvin J. Chomsky. Théoriquement, ce téléfilm devait servir de rampe de lancement pour une nouvelle série qui malheureusement ne verra pas le jour. Observons que ce téléfilm a beaucoup de points tant dans son univers que dans les scènes d'action avec "Les Mystères de l'Ouest".
Puis, le célèbre comédien s'engage ensuite dans une autre série où l'action domine nettement là-aussi : "L'Homme de Vienne". Pourtant, à l'origine de ce programme d'espionnage se trouve un téléfilm interprété par Roy Scheider. Il fut proposé au public le 30 avril 1972, pour tester son audience potentielle. Finalement, Robert Conrad remplacera un Roy Scheider devenu star au cinéma au pied levé (ce qui va devenir une habitude chez lui dans cette décennie 1970). Le tout pour une courte diffusion du 28 septembre 1972 au 09 juin 1973.
En effet, les huit épisodes de cette série racontant les aventures d'un agent expatrié en Autriche. Jake Webster dissimule des activités secrètes pour le compte du gouvernement américain derrière la façade de son restaurant. Ses huit aventures furent intercalées avec 16 autres pour former un show "umbrella" intitulé : "The Men". On entend par Umbrella un programme permettant la rotation d'épisodes avec des héros différents. Le tout semaine après semaine. Un genre qu'à brillamment illustré le réseau NBC avec le "NBC Mystery Movie". Celui qui aura vu la naissance de héros tels que "Columbo", "Banacek", "McCoy", "Hec Ramsey", "Un Shérif à New York" et tant d'autres...
De fait, le début des années 1970 est-il prolifique pour Robert Conrad. Mais, le succès public qu'il avait connu dans la précédente décennie semble alors le fuir. Toutefois, il donne la réplique à l’inspecteur Columbo dans l’épisode "Exercice Fatal" (1974). Il y incarne Milo Janus. Ce dernier est le propriétaire d’une chaîne de magasins de sports ayant détourné sur des comptes bancaires suisses une partie de ses profits. Parallèlement, il tourne dans quelques films et téléfilms tels "Comment voler l’étoile de l’Inde ?" (Marvin J. Chomsky -1975), et "Carambolage" (John Llewellyn Moxey - 1976), avec Vera Miles.
Le ciel ne peut pas attendre
En 1976, Conrad va rencontrer un nouveau personnage à sa mesure, un certain Greg Pappy Boyington. En effet, le comédien retrouve un engagement régulier dans l’excellente série "Les Têtes Brûlées". Celle-ci a été imaginée par Stephen J. Cannell. L'ensemble s'inspire de l’autobiographie d’un pilote américain devenu célèbre durant la Seconde Guerre mondiale pour ses multiples exploits contre les forces japonaises dans le Pacifique Sud. Robert Conrad y excelle dans le rôle du major Pappy Boyington. Un commandant d’escadrille aux méthodes aussi singulières qu’efficaces. Il dirige des hommes qui sont pour la plupart des brebis galeuses en marge de l’armée et promis à la cour martiale.
Malgré d’indéniables qualités, et une distribution prestigieuse, les responsables de la chaîne NBC annulent la série dès la fin de la première saison. Puis, ils décident de la programmer à nouveau au cours de l’automne suivant. Outre un changement de titre, cette seconde saison écourtée à 13 épisodes sera marquée par certains bouleversements dans la distribution. Notamment l’apparition de nouveaux interprètes, dont la propre fille de l’acteur, Nancy Conrad, engagée pour tenir le rôle d’une infirmière.
Le succès est immédiat dans de nombreux pays. Notamment en France où elle a été rediffusée à de très nombreuses reprises (avant une édition en Blu-ray que l'on doit à Elephant Films). Ce tournage aura donné à Robert Conrad le goût du pilotage puisqu’il passera par la suite son brevet.
Pasquinel
En 1978, Conrad participe à la mini-série "Colorado", d’après la nouvelle de James A. Michener, dans laquelle il interprète l'explorateur français Pasquinel. Dotée d’un excellent casting (Richard Chamberlain, Raymond Burr, Richard Crenna, Robert Vaughn, David Janssen, etc.), et d’un budget colossal pour l’époque, cette prestigieuse production raconte l’arrivée et l’installation de pionniers. Nous sommes à la fin du XVIIIème siècle, au cœur d’un territoire du Colorado. Ce dernier est uniquement peuplé de tribus indiennes.
Initialement dévolu à Charles Bronson, ou encore à Robert Blake, Robert Conrad héritera finalement du rôle de Pasquinel. Conrad y est particulièrement émouvant dans une composition dramatique inhabituelle. A la fois pleine de retenue et d’une grande sensibilité. En résumé, il y montre toute l’étendue de son talent d’acteur pour qui en douterait encore...
Retour à l'espionnage
On le retrouve peu après, en 1979, dans le rôle d’un ancien boxeur nommé Oscar "Duke" Ramsey, dans la très courte série "The Duke", diffusée d’avril à mai 1979. Après avoir arrêté les meurtriers de son manager, Oscar Ramsey devient détective privé, menant ses enquêtes en bénéficiant de la complicité de ses amis Joe Cadillac (Larry Manetti) et Dedra Smith (Patricia Conwell). A noter la présence de Red West dans le rôle du sergent Mick O’Brien.
Dans "Sloane, Agent Spécial", en 1979, il tient un nouveau rôle d'agent secret, un certain Thomas Remington Sloane III, qui travaille pour une nébuleuse organisation de contre-espionnage placée sous l’autorité du président des Etats-Unis. Dissimulée dans un magasin de jouets, cette organisation secrète possède un laboratoire ultramoderne qui fabrique de délirants gadgets expérimentés par une jeune technicienne nommée Kelly (Karen Purcill) ainsi qu’un ordinateur très sophistiqué baptisé Effie (dans la version originale la voix est celle de l’actrice Michele Carey, aperçue dans "La Nuit de la Terreur Ailée").
Secondé par Torque (Ji-Tu Cumbuka), un partenaire de poids à la main d’acier sur laquelle s’adaptent une multitude de gadgets, Sloane a pour mission de mettre hors d’état de nuire les membres d’une organisation criminelle. Cette série divertissante, créée par Cliff Gould, et produite par Quinn Martin, a malheureusement un peu vieilli quand on la revoit maintenant. Elle ne comporte que douze épisodes, diffusés sur NBC durant la saison 1979/1980, et pour la première fois en 1981 en France, où elle ne fut que très rarement rediffusée.
Entretemps, Robert Conrad avait retrouvé son rôle fétiche de l’agent secret James T. West, aux côtés de Ross Martin, dans deux téléfilms, sans grande envergure (car on avait choisi Burt Kennedy comme réalisateur qui visiblement n'avait rien compris à l'univers des "Mystères de l'Ouest" au détriment d'Irving J. Moore, le téléaste le plus prolifique de toute la série), mais malgré tout assez plaisants : "The Wild Wild West Revisited" ("Le retour des mystères de l’Ouest" en version française), en 1979, et "More Wild Wild West" ("Les Mystères du Far West"), en 1980. Dans les deux cas, Conrad y fait admirer sa condition physique, toujours aussi excellente, tout en affichant son attachement au personnage de James West.
Le cinéma pense à lui
Bien qu’il ait assez peu tourné pour le cinéma, on le voit successivement dans les films "Mort subite" (Eddie Romero-1977) et "Du Rouge pour un Truand" (Lewis Teague-1979) avant que sa filmographie ne s'enrichisse enfin d'une oeuvre digne d'intérêt. En effet, il partage l’affiche de "Meurtres en direct" (Richard Brooks-1982) avec Sean Connery, Katherine Ross et Leslie Nielsen. Ce récit de politique-fiction, basé sur un trafic d'engins nucléaires, est une véritable satire de l'évolution de la télévision et un réquisitoire pour le moins incisif contre les méthodes de la CIA, le voyeurisme des journalistes et l'irresponsabilité d’hommes politiques sans aucun scrupule.
Afin de garder un contrôle créatif plus affirmé sur ses futurs projets, Robert Conrad fonde, au début des années 1980, sa propre société de production, qu’il baptise Chane, avec laquelle il développe de nombreux projets auxquels ses enfants sont régulièrement associés (ses deux fils, mais aussi sa fille aînée Joan, qui est productrice exécutive). Certaines de ses productions deviennent donc de véritables affaires de famille, comme le téléfilm "Cinquante ans et star du foot" (1988), qu’il réalise en dirigeant son fils Shane Conrad. L’histoire est centrée sur la vie d’un ancien joueur de football américain devenu industriel qui reprend ses études à l’âge de 53 ans et parvient à intégrer l’équipe de football universitaire avec laquelle il connaît un succès inattendu.
TELEFILMS EN SERIE
Au début des années 80, il apparaît dans de nombreux téléfilms de qualité variable, de l'excellent "G. Gordon Liddy, L’homme qui en Voulait Trop" (Robert Leiberman - 1982), basé sur la vie du conseiller juridique du comité de réélection du président Nixon, qui fut impliqué dans l’affaire du Watergate, au moins intéressant "Le Financier" (Steve Gethers - 1983). Ajoutons "L’Ecole des héros" (Peter Werner - 1984) et "Assassin" (1986), réalisé par Sandor Stern. Dans ce récit d'anticipation, il est un ancien agent de la CIA chargé de mettre hors d’état de nuire un robot doté d'un armement très sophistiqué, programmé pour assassiner des personnalités politiques très importantes. On le voit, beaucoup de rôles très physiques pour l’acteur qui s’était entre-temps remarié avec une jeune femme de dix-huit ans nommé LaVelda Fann, rencontrée l’année précédente.
On retiendra également de cette période "Faut-il tuer Dan Malone ?" (Jerry Jameson - 1986) où Robert Conrad interprète un officier de la police new-yorkaise qui découvre, au cours d’une enquête de routine, l’existence au sein même de la police d’un commando secret chargé de combattre le terrorisme sur le territoire américain. Citons aussi "Le Cinquième missile" (Larry Peerce - 1986 / Diffusion France le : août 1987 sur FR3 / Rediffusion France le : 08 juin 1989 sur FR3), avec David Soul et Sam Waterston, où il interprète le commandant d'un sous-marin nucléaire américain chargé de tester des missiles dans l’optique d’une Troisième Guerre mondiale. Ou bien encore "Une Bavure policière" (James Darren-1988), où il est un policier victime d'un coup monté qui est condamné aux travaux forcés et se retrouve emprisonné avec les criminels qu'il a fait arrêter, et "Le Parrain est trop bon" (Virgil W. Vogel - 1991) ainsi que "Vengeance sur parole" (Peter H. Hunt-1993).
Dans "Le Parrain est trop bon", il est un chef de la mafia de Chicago qui s’efforce d’élever malgré lui les cinq enfants de sa sœur, devenus orphelins après le décès de leur grand-mère maternelle. Son interprétation d'un mafioso au grand coeur prouve que l'acteur est également très à l'aise dans le registre de la comédie. Dans "Vengeance sur parole", il est l'officier de police Jack Stewart qui enquête sur les assassinats de plusieurs adolescents en Californie. L'intrigue reste passionnante jusqu'aux derniers instants et procure quelques bons moments de suspense grâce à d'habiles rebondissements. Robert Conrad est particulièrement convainquant dans le rôle de ce policier lancé sur les traces d’un assassin.
A la fin des années 80, il retrouva un rôle titre dans la série "High Moutain Rangers", diffusée en 1988, sur CBS, où il interprète Jesse Hawkes, fondateur d'une équipe de secours d'élite établie dans les montagnes de la Sierra Nevada près du lac Tahoe. Séparé de sa femme, Hawkes vit dans une maison isolée avec son jeune fils Cody (Shane Conrad), et, bien qu’officiellement à la retraite, il n’hésite pas à prêter main forte à son fils Matt (Christian Conrad), qui a pris la relève, lors de ses missions de sauvetage. Outre ses deux fils, l’acteur s’est également entouré pour l’occasion de sa fille, productrice exécutive de cette série tournée dans les superbes décors naturels du lac Tahoe. L’année suivante, les acteurs sont à nouveau réunis dans une courte série intitulée "Jesse Hawkes", diffusée sur CBS, d’avril à mai 1989, où l'on retrouve les mêmes personnages qui opèrent dorénavant à San Francisco après l’accident de Matt, blessé lors d’un affrontement avec des trafiquants de drogue.
Parmi ses dernières productions télévisuelles, on retiendra "Search and Rescue" (traduit en français par "Les Hommes de bonne volonté"), qui fut diffusée en 1993 sur NBC. L’histoire se déroule à Bear Valley, au coeur de la Sierra Nevada. Un groupe constitué d’hommes et de femmes met en place bénévolement une unité de secourisme afin de prêter assistance aux personnes victimes d’accidents de montagne. Il y est un pilote d’hélicoptère nommé Tooter Campbell. Il faut alors noter la présence à ses côtés de sa femme dans le rôle de Lisa, qui s’occupe de la station service locale. Enfin, on a pu le voir brièvement tenir le rôle d’un officier de police dans le film "La Course au jouet" (Brian Levant - 1996) avec Arnold Schwarzenegger, qui marquait son retour au cinéma après plus de dix ans d’absence.
CONCLUSION
Ces dernières productions montrent que Robert Conrad était avant tout un humaniste proche de la nature. Il résida ainsi pendant de nombreuses années dans une immense propriété à Bear Valley, dans la Sierra Nevada, dans une demeure très vaste située en pleine verdure. En semi-retraite depuis le début des années 2000, il profitait de son temps libre pour s’occuper de ses enfants (il a eu trois filles de son second mariage, Kaja, Chelsea et Camille) et petits-enfants, et pour voyager en compagnie de sa famille.
Malheureusement, son passé, parfois tumultueux notamment dans sa consommation excessive d'alcool, l'aura rattrapé quand on a appris qu'il avait été la victime d'un accident de voiture, au milieu des années 2000, dont il portera les stigmates jusqu'à son décès. Fort heureusement, il avait trouvé dans la radio de quoi développer une nouvelle carrière. En effet, à partir de 2008, il anima un show sur CRN qui rassemblait près de 6 millions d'auditeurs chaque semaine. Une émission qu'il essaya d'animer autant que possible malgré une santé déclinante jusqu'à l'annonce de sa disparition en février 2020.
Néanmoins, au-delà de ce pénible événement (qui relève de la vie privée et que nous n'avons pas à juger au fond), le portrait de Robert Conrad que vous venez de lire, est, en définitive, significatif de la carrière d'un artiste complet. Il fut à la fois acteur, réalisateur, producteur, cascadeur et même chanteur. Il aura beaucoup consacré de temps à la télévision. Aussi, sa longévité à l'écran n'a d'égale que celle de la qualité de ses interprétations. Ainsi, sa carrière comporte-t-elle de fort belles réussites telles "Colorado" et "Les Têtes Brûlées". Toutefois, l'apogée de son parcours demeure pour le grand public son rôle de charme et de choc dans "Les Mystères de l'Ouest". Une série qui en a fait une des stars parmi les plus populaires du petit écran.
Enfin, et quoiqu'il advienne désormais, Robert Conrad, aujourd'hui disparu, demeure à tout jamais le héros de mon enfance. En effet, il demeure ce vieil ami dont j'ai toujours autant de plaisir à voir et revoir encore toutes les séries auxquelles il a participé. Au fond, une chose est certaine avec lui : jamais de déception au rendez-vous ! Ainsi, Robert Conrad aura-t-il été un professionnel digne d'éloges tout au long d'une carrière dont la longévité est à elle seule la plus belle des démonstrations de son talent. Merci et chapeau bas Monsieur Conrad !
FILMOGRAPHIE
Séries en tant que vedette
HAWAIIAN EYE (MISSION A HAWAI) (1959/1963)
THE WILD WILD WEST (LES MYSTÈRES DE L’OUEST) (1965/1969)
THE D.A. (1971-1972)
ASSIGNMENT VIENNA (L'HOMME DE VIENNE) (1972/1973)
BLACK SHEEP SQUADRON (LES TETES BRULEES) (1976/1978)
COLORADO (1978)
THE DUKE (1979)
A MAN CALLED SLOANE (SLOANE, AGENT SPECIAL) (1979)
HIGH MOUNTAIN RANGERS (1988)
JESSE HAWKES (1989)
-HIGH SIERRA SEARCH AND RESCUE (1995)
Séries en tant que vedette-invitée
MAVERICK : « Yellow river » (1959)
SEA HUNT : « The stunt » (1959) & « Water-ski show » (1959)
COLT 45 : « Amnesty » (1959)
MAN AND THE CHALLENGE : « Maximum capacity » (1959)
77 SUNSET STRIP : « Only zeroes count » (1959) & « Who killed Cock Robin ? » (1960)
THE GALLANT MEN : « And Cain cried out » (1962)
TEMPLE HOUSTON : « The town that trespassed » (1964)
THE KRAFT SUSPENSE THEATRE (HAUTE TENSION) : « Four into zero » (Un gros coup pour rien) (1965)
MANNIX : « The playground » (La scène) (1969)
MISSION : IMPOSSIBLE : « The contender » (Combats) (en deux parties) (1968), « Killer » (Killer) (1970) & « Break » (Billard électronique) (1972)
ALL IN THE FAMILY : « Mike and Gloria’s wedding » (en deux parties) (1971).
COLUMBO : « An exercise in fatality » (Exercice Fatal) (1974)
J.J. STARBUCK : « Killing in the market » (1987)
Emission spéciales
THE JOEY BISHOP SHOW (1969)
THE MIKE DOUGLAS SHOW (1976)
BATTLE OF THE NETWORK STARS (1976-1979)
CIRCUS OF THE STARS (1977)
SATURDAY NIGHT LIVE (1980)
TV’S WESTERN HEROES (1995)
POLITICALLY INCORRECT (1995-1998)
Téléfilms
LA NUEVA CENICIENTA (LE ROSSIGNOL DE CASTILLE) (George Sherman-1965)
THE D.A. : MURDER ONE (Boris Sagal-1969)
LOS BANDIDOS ou THE BANDITS (LES BANDITS) (Robert Conrad et Alfredo Zacharias-1967)
WEEKEND OF TERROR (Jud Taylor-1970) / Diffusion France le : 12 juin 1989 sur La Cinq
THE D.A. : CONSPIRACY TO KILL (Paul Krasny-1971)
THE ADVENTURES OF NICK CARTER (LES AVENTURES DE NICK CARTER) (Paul Krasny-1972)
FIVE DESPERATE WOMEN (CINQ FEMMES EN DANGER) (Ted Post-1972)
THE LAST DAY (LE DERNIER JOUR) (Vincent J. McEveety-1975) / Diffusion France le : 30 avril 1987 sur La Cinq
SMASH-UP ON INTERSTATE 5 (CARAMBOLAGE) (John Llewellyn Moxey-1976)
BREAKING UP IS HARD TO DO (Lou Antonio-1979)
THE WILD WILD WEST REVISITED (LE RETOUR DES MYSTÈRES DE L'OUEST ) (Burt Kennedy-1979)
MORE WILD WILD WEST (LES MYSTERES DU FAR WEST ) (Burt Kennedy-1980)
COACH OF THE YEAR (Don Medford-1980)
WILL : THE AUTOBIOGRAPHY OF G. GORDON LIDDY (G. GORDON LIDDY, L’HOMME QUI EN VOULAIT TROP) (Robert Leiberman-1982)
CONFESSIONS OF A MARRIED MAN (LE FINANCIER) (Steve Gethers-1983)
HARD KNOX (L'ÉCOLE DES HÉROS) (Peter Werner-1984) / Diffusion le : 3 mai 1987 sur M6
MOVING VIOLATIONS (Neal Israel-1985)
TWO FATHERS’ JUSTICE (Rod Holcomb-1985)
ASSASSIN (ASSASSIN) (Sandor Stern-1986)
CHARLEY HANNAH (BAVURE À MIAMI) (Peter Hunt-1986)
THE FIFTH MISSILE (LE CINQUIÈME MISSILE) (Larry Peerce-1986) / Diffusion le : 6 août 1987 sur FR3
ONE POLICE PLAZA (LE BRAS ARME DE LA LOI ou FAUT-IL TUER DAN MALONE ?) (Jerry Jameson-1986) / Diffusion le : 29 mars 1989 sur La Cinq
CROSSFIRE (Robert Conrad et Alfredo Zacharias-1986)
HIGH MOUNTAIN RANGERS (Paul Krasny-1987)
POLICE STORY : GLADIATOR SCHOOL (UNE BAVURE POLICIÈRE) (James Darren-1988)
GLORY DAYS (50 ANS ET STAR DU FOOT) (Robert Conrad-1988)
MURDER ONE (Graeme Campbell-1988) (non crédité)
ANYTHING TO SURVIVE (Zale Dalen-1990)
MARIO AND THE MOB (LE PARRAIN EST TROP BON) (Virgil Vogel-1991)
SWORN TO VENGEANCE (VENGEANCE SUR PAROLE) (Peter H. Hunt-1993)
HIGH SIERRA SEARCH AND RESCUE (LES HOMMES DE BONNE VOLONTÉ) ( Paul Krasny-1993)
SAMURAI COWBOY (Michael Keusch-1993)
TWO FATHERS : JUSTICE FOR THE INNOCENT (LA HAINE DANS LE SANG) (Paul Krasny-1995)
Films
THE COMMIES ARE COMING (George Waggner-1957)
THUNDERING JETS (Helmut Dantine-1958)
PALM SPRINGS WEEKEND (LES DINGUES SONT LACHÉS) (Norman Taurog-1963)
YOUNG DILLINGER (Terry Morse-1965)
MURPH THE SURF (COMMENT VOLER L’ÉTOILE DE L’INDE) (Marvin J. Chomsky-1975)
SUDDEN DEATH (MORT SUBITE) (Eddie Romero-1977)
THE LADY IN RED (DU ROUGE POUR UN TRUAND) (Lewis Teague-1979)
WRONG IS WRIGHT (MEURTRE EN DIRECT) (Richard Brooks-1982)
JINGLE ALL THE WAY(LA COURSE AU JOUET) (Brian Levant-1996)
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