Critiques de sériesDossiers séries TV

Les deux font la paire, la série : La 3ème saison

Par Thierry Le Peut

les-deux-font-la-paire-serie-3
Crédits photo : CBS Television - Warner Bros. Television - Collection Régis Dolle.
Franchir le Rubicond

La troisième saison, qui est passée chez nous à un rythme quotidien en 1988, au contraire des deux premières diffusées (dans un désordre assez consternant) le dimanche après-midi dans le cadre du "Dimanche Martin", sera celle de tous les possibles. Après plusieurs « mariages » et une cinquantaine d'aventures, l'espion et la ménagère se connaissent maintenant très bien et ont dépassé l'étape de la découverte. Le public, fidélisé, réclame autre chose, comme il le fera toujours, pour Tony et Angela dans "Madame est servie", pour Lois et Clark dans "Les Nouvelles aventures de Superman", ou pour les autres couples phares du genre.

Si le mariage désiré n'est pas encore célébré, en revanche les amoureux romantiques (l'heure n'est plus à se voiler la face) multiplient les occasions ratées et la tentation grandissante maintient une tension sexuelle accrue : la question est « Quand vont-ils s'embrasser ? », ou « Quand vont-ils s'avouer leur amour ? », bref : « Quand vont-ils se décider à franchir le pas ? » Chaque semaine, le téléspectateur peut se dire que le jour est arrivé, enfin, tout en s'attendant (parce qu'il a l'habitude, quand même...) à être déçu. Ce qui ne l'empêchera pas de revenir la semaine suivante ou de maudire les programmateurs lorsqu'ils feront traîner les choses en intercalant des rediffusions entre deux inédits. Afin d’ajouter du piment aux relations des héros, les scénaristes introduisent par ailleurs dans quelques épisodes une double diversion : une nouvelle petite amie, Leslie O’Connor, et l’ex-mari d’Amanda, Joe King.

Changement de ton

Alors que la deuxième saison avait misé sur le « glamour » dispendieux en expédiant le couple en Europe, la troisième marque une rupture avec l’inspiration des deux premières années. Juanita Bartlett est remplacée à la production exécutive par George Geiger, qui avait travaillé précédemment sur "Magnum" et "Rick Hunter", et les dépenses de la saison précédente sont freinées : adieu l’étranger, Scarecrow et Mrs King reviennent au pays.

Ainsi, avec « La belette sibérienne », écrit par Geiger lui-même, l’histoire est-elle recentrée sur la relation ambiguë qui unit les deux protagonistes. Ils travaillent désormais dans leur propre bureau, au sein de l’International Film Fed qui sert de couverture aux locaux souterrains de l’Agence. Séparés des autres agents, ils bénéficient ainsi d’un espace clos. Un lieu où leur relation pourra finalement se développer à l’abri des regards extérieurs.

On en apprend peu à peu davantage sur leurs passés respectifs. D'un côté, celui d’Amanda avec le retour de Joe King. D'un autre côté, celui de Lee avec l’arrivée d’un nouveau personnage qui mérite qu’on lui accorde quelques lignes. Incarné par le comédien Howard Duff (le shérif Titus Semple dans "Flamingo Road", également vu plus tard dans "Dallas" et dans "Côte Ouest"), Harry Thornton Jr est une véritable légende au sein de l’Agence, dont il fut le créateur, à la demande du Président Eisenhower, en 1954.

Flanqué d’un chat prénommé Ike (!), Thornton fut aussi le mentor de Lee, qui lui doit la plus grande partie de ses talents d’espion. Agent triple durant des années, il demande l’aide de Lee et Amanda dans « La belette sibérienne » afin de laver son honneur. Pressenti pour devenir un nouveau « régulier » de la série, Thornton ne reviendra pourtant pas avant... le dernier épisode de la série, « Une femme de trop », près de deux ans plus tard.

Une série plus sérieuse

En fait, « La belette sibérienne » est une sorte de concentré de la nouvelle direction prise par la série. En effet, plus d’intrigues internes à la Grande Maison de l’espionnage, plus d’action et moins de « fantaisie romantique ». Comme si, en perdant peu à peu l’innocence des débuts, Mme King entraînait la série tout entière vers plus de maturité, en l’occurrence un ton plus sérieux. La lumière elle-même accompagne cette évolution, plus sombre et plus contrastée que dans les deux premières saisons.

On ne peut s’empêcher, pourtant, de déplorer dans plusieurs épisodes le peu d’attention accordé au personnage d’Amanda. Devenue plus grave, elle n’a souvent plus rien de la ménagère gaffeuse mais enthousiaste des débuts. Désormais rodée à la discipline de ce qui est devenu son nouveau métier, pliée aux règlements et aux dangers de la vie d’espion bien qu’encore inexpérimentée, Amanda semble perdre son humour et paraît parfois bien terne. Elle qui était si vivante jusqu’alors ! En passant de mains féminines (Eugenie Ross-Leming puis Juanita Bartlett) en des mains masculines (Geiger et Robert W. Gilmer, producteur superviseur puis co-producteur exécutif de la saison 4), la série perd ainsi une légèreté qui faisait son charme. En somme, elle semble se « viriliser » tout en hésitant sur la route à prendre.

Dans « La belette sibérienne », on voit la secrétaire de l’International Film Fed, Mme Marston, totalement effacée jusqu’alors, sortir un fusil mitrailleur de son bureau et mitrailler l’antichambre de l’Agence pour tenter d’arrêter un intrus ! En résumé, une scène hautement parodique et « nonsensuelle » qui tranche avec la gravité souvent affichée par les personnages au fil des nouveaux épisodes.

 

LES ORIGINES DE LA SERIE LES DEUX FONT LA PAIRE

ça peut vous interesser

Les deux font la paire, la série : La 2ème saison

Rédaction

Les deux font la paire, la série : La 1ère saison

Rédaction

Hawkins, la série avec James Stewart : Guide des épisodes

Rédaction