Par Christophe Dordain
"Le coeur au ventre" est finalement un très bon feuilleton ! En effet, voici un ensemble de six épisodes qui raconte l'histoire d'une solide amitié dans le milieu de la boxe. Tout d'abord, on découvre un très jeune homme, Philippe. Puis, un homme qui voit fuir sa jeunesse, Nino. Enfin, un troisième, Roger, qui veut échapper à sa condition en devenant champion. Et puis, autour d'eux, tout un monde qui aime, qui souffre, qui fait des projets.
LES BONS SENTIMENTS FONT PARFOIS LES BONS FEUILLETONS
Un solide trio comme point de départ
La chronique d'une amitié
"Le coeur au ventre" est le prototype du bon feuilleton à la française, avec une volonté de dépeindre un milieu social, celui de la boxe, tout en respectant un souci de vérité et de sincérité cumulées qui donne à l'ensemble un cachet indéniable. On croirait presque, parfois, se retrouver dans les meilleurs moments de "Rocky" avec Sylvester Stallone, réalisé par John G. Avildsen cette même année 1976.
"La chronique d'une amitié" annonçait haut et fort Robert Mazoyer dans Télé 7 Jours du 29 octobre 1976, "celle de trois jeunes provinciaux qui font connaissance notamment dans une salle d'entraînement de boxe à Paris. On y raconte leurs amours, leurs défaites, leur solitude dans Paris. C'est un film que j'ai voulu comme "Les cousins de la Constance", tout en reportage, et qui est aussi un film sur Paris. C'est un prétexte à balades à travers les milieux populaires et artistiques de la capitale. J'ai choisi le scénario de Jean-Pierre Petrolacci, qui est violent et tendre à la fois, parce que, après "L'enchantement" et "Les charmes de l'été", j'avais besoin de revenir à la violence."
Des comédiens impliqués
Tout d'abord, à propos de la préparation du tournage du feuilleton, Mazoyer, dans cet entretien, précisait que "mes trois interprètes se sont exercés à la boxe trois mois avant le tournage. Un seul n'en avait jamais fait. J'ai tourné ensuite sans truquage, en public, à la salle Wagram, devant deux mille spectateurs et en province, avec quatre caméras." Il est vrai qu'il faut alors souligner le caractère vériste des scènes de boxe ainsi que l'implication physique du trio de comédiens qui expliquent pour beaucoup l'intérêt que l'on porte au visionnage de la série "Le coeur au ventre".
Ensuite, parmi eux, on relève la forte présence de Sylvain Joubert. Ce dernier avait connu un grand succès en 1974 avec "Ardéchois, Coeur Fidèle". A propos du "Coeur au ventre", toujours dans ce Télé 7 jours du 23 octobre 1976, il déclarait ceci : "quand j'ai joué "Le coeur au ventre" avec Robert Mazoyer, il y avait longtemps que nous souhaitions travailler ensemble. C'était pourtant une époque où je vivais à la campagne, je ne souhaitais pas tourner, mais il a insisté et j'en suis heureux, car nous avons fait ce travail en parfaite osmose."
Robert Dalban, le plus de la série
Toutefois, si ce feuilleton est indéniablement porté par son trio vedette, il ne faudrait pas pour autant oublier un acteur majeur de cette histoire : Moroni. Le rôle en est tenu par une pointure du cinéma français des années 50, 60 et 70. En l'occurrence, Robert Dalban dont c'était la seconde participation à un feuilleton de longue durée. En effet, il avait été le supérieur hiérarchique de Philippe Nicaud dans "L'Inspecteur Leclerc" (entre 1962 et 1963).
Robert Dalban avait 73 ans à l'époque. Et pour une seconde aventure au petit écran, la satisfaction était au rendez-vous : "je me suis bien entendu avec Robert Mazoyer, le réalisateur, et surtout cela m'a fait plaisir de tenir le rôle d'un brave type. J'ai été si souvent truand ou flic !" déclarait-il dans le Télé 7 Jours en date du 04 décembre 1976. Qui plus est, on apprend au cours de cet entretien que Dalban connaissait bien le milieu de la boxe pour l'avoir pratiquée en 1919.
COMMENT LA CRITIQUE A-T-ELLE RECU "LE COEUR AU VENTRE" ?
Télé 7 Jours
"Conviction et ressemblance". Tel était le titre de la critique sous la plume de l'incontournable Georges Hilleret dans Télé 7 Jours du 20 novembre 1976, un mois après le début de la diffusion du feuilleton. Dans une critique comparant "Le coeur au ventre", "La poupée sanglante" de Marcel Cravenne et "Le pied à l'étrier" de Claude Loursais, Hilleret y faisait le constat suivant : "les auteurs de ces histoires ont su retrouver les bonnes vieilles règles des feuilletonnistes du siècle dernier, à savoir l'étude attentive d'un milieu donné, telle que la pratiquaient Balzac, Eugène Sue ou Emile Zola. C'est la meilleure façon de nous rendre une histoire vivante et intéressante, mais surtout de la rendre vraie. Guy Marchand, en champion déchu, Sylvain Joubert, en espoir du ring et François Leccia en ami sûr, s'inscrivent très bien dans cet univers pugilistique."
Le Monde
Une autre illustration critique extraite du journal Le Monde au hasard d'une rediffusion sur TMC en janvier 1994 : "Le coeur au ventre" ne traite pas que de sport. Ainsi, parle-t-il aussi des aventures sentimentales des trois boxeurs, et d'un secret de famille. En l'espèce, celui qui oblige Philippe à pratiquer la boxe en cachette de son père. De tous ces ressorts, le scénariste a joué habilement, captant même l'attention de spectateurs qui ne vouent pas le moindre intérêt aux sports de combat. Qui plus est, la réalisation efficace de Robert Mazoyer est bien servie par le charisme du trio de comédiens principaux Guy Marchand (Nino), Sylvain Joubert (Roger), François Leccia (Philippe), et la présence lumineuse de Sylvie Fennec. En somme, le tout forme un feuilleton qualité France qui se suit très agréablement."
DISTRIBUTION
Sylvain Joubert : Roger Konacker
François Leccia : Philippe Morand
Guy Marchand : Nino Cerretti
Sylvie Fennec : Catherine Morand
Robert Dalban : Moroni
Sophie Agacinski : Eliane Cerretti
Virginie Boulze : Lucie Cerretti
Pierre Valde : Mr Corbert
Jean Reney : Mr Morand
Karin Petersen : Marie-Claude Mancier
Lionel Gaudin : Kowacs
Michel Charrel : Max Travers
Gérald Denizeau : Le masseur
Gérard Croce : Cottard
Jacqueline Dufranne : Mme Romand
Jenny Arasse : Juliette Moroni
Tony Rödel : Hans Mödel
Jenny Clève : Mme Konacker
Guy Dhers : Louis Konacker
FICHE TECHNIQUE
Producteur délégué : Roger Deplanche
Supervision de la production : Michel Decaix, Robert Mahé
Secrétaire de production : Véronique Guillaume
Scénario et dialogues : Jean-Pierre Petrolacci
Directeur de la photographie : Jean-Jacques Guyard
Musique : Jacques Loussier
Cadreurs : Eric Faucherre, Christian Ritt
1er assistant-réalisateur : Michel Picard
2ème assistant-réalisateur : Ronan Le Grand
Scripte : Jacqueline Ferrari
Ingénieurs du son : Yvon Dacquay, Clément Buhler
Chef maquilleur : Alain Lerrede
Habilleuse : Irène Delektorsky
Décors : Michel Decaix, Robert Mahé
Cascades : Pierre Rosso, Jean Galtat, Pierre Koulak
Conseiller pour la boxe : Jean Capel
Régisseur extérieurs : Daniel Sarmir
Régisseurs de plateau : Hugues Nonn, Elisabeth Rouland
Direction du montage : Pierre Houdain
Montage : Bernard Bougouin, Alain Bayet
Accessoires : Yves Seigneuret
Co-production : Antenne 2 / Telfrance (1976)