Par Christophe Orzechowski
PRESENTATION
"Felicity" est une série dramatique américaine en 4 saisons et 84 épisodes. Elle a été diffusée aux Etats-Unis sur la chaîne WB entre le 29 septembre 1998 et le le 22 mai 2002. C'est une création que l'on doit à J.J. Abrams et Matt Reeves. La série ayant été produite par Imagine Television et Touchstone Television. Les principaux producteurs exécutifs sont J.J. Abrams, Matt Reeves, Brian Grazer, Tony Krantz et Ron Howard.

PREAMBULE
« Chère Felicity. Tu as laissé, sache-le, de très bons souvenirs aux téléspectateurs et téléspectatrices qui t’ont découverte, sur TF1. C'était à l’occasion d’un samedi après-midi passé à la maison. »
FELICITY OU LES ANNEES FAC D'UNE JEUNE FEMME TERRIBLEMENT ROMANTIQUE
Felicity Porter, l’héroïne de la série, est une jeune femme simple, douce et charmante, qui s’apprête à entrer à l’université de New York. Une université qu’elle a choisie… sur un coup de tête, pleine de rêves et de naïveté, afin d’y retrouver Ben Covington, un jeune homme doux et attentionné, qui y est également inscrit. Ben, pour lequel elle a le béguin, et qui lui a écrit, sur son almanach du lycée, à sa demande un très gentil message, qui permet de lui faire espérer. Felicity le retrouvera, lui avouera ses sentiments, et, elle n’en doute pas, tous deux vivront une belle et agréable romance.
Mais la réalité est souvent cruelle, et source de désillusions : Ben, qui aurait dû voir l’attirance de la jolie brune pour lui, s’est déjà trouvé une petite amie, quand elle le revoit lors à la fac. Et Felicity fait la rencontre d’un ami de Ben, Noël, tout aussi charmant et gentil que lui, qui commence à craquer pour elle. Felicity se retrouve alors à devoir choisir entre céder à Noël, ou continuer d’espérer que Ben ouvre les yeux et lui ouvre son cœur, tandis que ce dernier… souffle un peu le chaud et le froid. Ne veut-il pas blesser la jeune femme ? Ou bien, avec un côté quelque peu manipulateur, veut-il la garder dans son entourage comme une éventuelle possibilité ?

QUI EST FELICITY ?
Le personnage de Felicity rappelle quelque peu, avec cette légère naïveté qui la caractérise, les personnages d’Ally McBeal, apparue un an plus tôt, en 1997, sur les écrans de télévision américains dans la série éponyme. Mais aussi, et dans une moindre mesure, peut-être aussi, le personnage de Loïs Lane de la série "Loïs & Clark : Les Nouvelles Aventures de Superman".
Dans les deux séries que sont "Felicity" et "Ally McBeal", la série commence par la voix-off de l’héroïne, qui fait plonger les téléspectateurs dans ses pensées et ses états-d’âme. Une voix-off qui se justifie par le fait que Felicity s’adresse à une certaine Sally, par le biais de cassettes enregistrées qu’elle lui envoie, et à laquelle elle confie ses joies, ses peines et ses doutes.

UNE SERIE FEMINISTE
Le féminisme des années 1990, à la télévision américaine, s’incarne aussi dans ce type d’héroïne, belle et indépendante, qui a préféré d’abord se consacrer à réussir professionnellement en trouvant un travail leur permettant de ne pas dépendre d’un homme, financièrement, mais en remettant la recherche du grand amour à plus tard, avec comme conséquence de rêver au prince charmant, de se nourrir d’illusions, et de risquer de se voir griller au poteau.
La série "Felicity", de façon générale, est à l’image de son héroïne. Elle présente une vision quelque peu idéalisée des études universitaires américaines, et met en scène un univers doux, calme et paisible. Aucun des personnages de la série ne constituera de véritable antagoniste. Tous les personnages vus dans la série n’auront rien de véritablement détestable.

FELICITY OU LES OBSESSIONS DE J.J. ABRAMS DEJA A L'OEUVRE
La série "Felicity" a un intérêt historique certain, pour celui ou celle s’intéressant à l’histoire des séries télévisées, puisqu’elle contient déjà la plupart des divers thèmes que J.J. Abrams réutilisera, dans les productions ultérieures qu’il créera. Ou que l’on pourra trouver dans les productions Bad Robot ultérieures. Le fait de s’intéresser, par exemple, à un âge de la vie plutôt qu’un autre. L’adolescence n’est pas une période qui intéresse J.J. Abrams. La plupart des héros qu’il mettra en scène seront des jeunes adultes, entre 20 et 30 ans, au sortir justement de l’adolescence, et qui sont confrontés aux premières vraie difficultés de la vie. Un âge où l’on est déjà d’une certaine maturité, mais auquel on continue d’aimer encore sortir et faire la fête, tant qu’on le peut.
Ce sera le cas de Sydney Bristow et ses amis, Will Tippin et Francie Calfo, de la série "Alias", mais aussi des personnages principaux de "Cloverfield", ou encore de certains personnages de "Lost", comme Charlie et Claire, Kate, ou encore Shannon et Boone. Un âge, où théoriquement, on s’est quelque peu affranchi de l’autorité parentale, ou l’on est en passe de l’être, et si l’on était en opposition avec ses parents, soit on se réconcilie avec eux, soit de toute façon, on prend son indépendance. Si Felicity a choisi de poursuivre ses études à l’université de de New York, c’est certes pour rejoindre Ben, mais aussi pour s’éloigner de ses parents, quitter leur tutelle.
Dans "Felicity", J.J. Abrams ne peut s’empêcher d’afficher son goût pour le mystère, sans non plus en faire un élément-clé de l’intrigue. Meghan, la colocataire de Felicity, possède ainsi une « Mystery Box ». Une boîte-mystère, dont personne ne sait vraiment ce qu’elle renferme. Tant que la boîte n’est pas ouverte, l’imagination de chacun ne peut que supposer, fantasmer, ce qu’elle pourrait contenir. J.J. Abrams possède lui-même une boîte de ce type, qu’il n’a jamais ouverte. Et il va commencer également à glisser des références à ses œuvres fétiches, celles qui l’ont influencé par la suite.
Tel est le cas de l’épisode 2.11, qu’il écrit, réalisé par Lamont Johnson. Un épisode tourné finalement en noir et blanc. Un de ces épisodes spéciaux que les séries télévisées, sûres d’elles-mêmes, et de l’intelligence de leur public pour en comprendre l’intention, s’amusent parfois à proposer. Un épisode type « Quatrième Dimension », réalisé par l’un des réalisateurs réguliers de la série originale "La Quatrième Dimension", de 1959. Un épisode dans lequel le contenu de la boîte de Meghan est révélé, mais cette révélation a tout d’une blague, et n’est là que pour servir l’épisode.

LA DISTRIBUTION DE LA SERIE FELICITY
Pour incarner Felicity, c’est l’actrice Keri Russell qui est choisie. Une actrice peu connue à l’époque. Pourtant déjà apparue dans quelques téléfilms et épisodes de séries en guest-star. Par exemple, Russell a fait partie de la distribution régulière de "Couleur Pacifique" (1996), série de dix épisodes seulement. Toutefois, cette dernière va permettre à la comédienne d’acquérir une certaine notoriété. On la reverra donc dans de nombreux projets. Parmi les plus notables, on peut noter sa participation à l’excellente série d’espionnage "The Americans" (2013/2018). Plus récemment, Russell a connu un grand succès avec "La Diplomate". Une série qui compte déjà trois saisons, proposées par Netflix depuis avril 2023. Une quatrième est d'ores et déjà prévue.
A ses côtés, pour incarner Ben Covington, c’est le comédien Scott Speedman qui a été choisi. Un acteur vu notamment dans le film "Underworld" et dans la série "The Last Resort". Scott Foley, l’interprète de Noël, sera l’un des acteurs principaux de la courte série d’espionnage "Whisley Cavalier". Mais aussi le premier époux de Jennifer Garner. Tous deux se rencontrèrent sur le tournage de la série. On le reverra aussi au casting du film "Scream 3".
Julie, elle, fut incarnée par Amy Jo Johnson. Elle demeure l’éternelle première Ranger, Rose Kimberly, dans la saga "Power Rangers". Ensuite, elle jouera un rôle régulier dans la série "Flashpoint". Amy Jo Johnson est également une talentueuse chanteuse et musicienne. Ainsi, compte-elle quatre albums musicaux à son actif. Elle a également, au cours des années 2010, réalisé deux long-métrages.
A leurs côtés, plusieurs acteurs et actrices vont interpréter des personnages semi-recurrents. On citera Greg Gunberg, ami d’enfance de J.J. Abrams. Celui-ci lui laissera toujours un petit rôle dans ses projets. On mentionnera aussi Amanda Foreman, l’interprète de Meghan, qui apparaîtra elle aussi dans "Alias". Sans oublier enfin Kevin Weisman ! Un acteur à l’impressionnante carrière mine de rien. En effet, il a tourné dans un grand nombre de séries des années 1990 et 2000 en tant que guest-star. Ainsi, il fut notamment Marshal Flinkman dans "Alias".
Pour conclure, d’autres visages très connus des amateurs de la série sont également apparus dans la série. On citera donc pêle-mêle Donald Faison ("Clueless", "Scrubs"), Christopher Gorham ("Jake 2.0", "Covert Affairs"), Amy Aquino ("Urgences", "Bosch"), Sarah-Jane Morris ("Brothers & Sisters") et Lisa Edelstein ("Dr House").

LA DIFFUSION EN FRANCE : UN ECHEC CUISANT
En France, la diffusion française de la série fut un échec d’audience. Bref, un véritable fiasco ! C’est TF1 qui acquit les droits de diffusion de la série. A l’époque, c’est-à-dire dans la seconde partie des années 1990, une série diffusée aux Etats-Unis sur la WB (qui offre un bon vivier de séries s’adressant à un public d’adolescents et de jeunes adultes) assurait déjà les belles heures des samedis après-midis sur TF1 : "Dawson".
Les responsables de TF1 ont alors dû se dire que le public de la série se rabattrait facilement sur une série semblant également être un teen-drama. Un programme mettant en scène des amours adolescentes. Sauf que "Felicity" n’était pas exactement cela. Sa tonalité était totalement différente et ses personnages n’avaient rien à voir. Son rythme lent, et son côté doux, convenaient probablement mal à une diffusion le samedi après-midi. En effet, aux USA, "Felicity" était diffusée à 21 heures. Malheureusement, donc, le public ne fut pas au rendez-vous. TF1 ne diffusa finalement que la saison 1 de "Felicity". Par la suite, elle ne lui donna pas une nouvelle chance même dans d’autres cases-horaires.
En DVD, seul un coffret de la saison 1 fut proposé à la vente, sans que la suite ne soit non plus éditée. Une injustice quelque peu cruelle pour une série qui fit partie, en 2007 du classement établi par Time Magazine des « 100 meilleures séries TV de tous les temps ». Quant à Felicity Porter, elle fera partie des « 100 plus grands personnages des 20 dernières années » d'après le magazine Entertainment Weekly (2010).
Pour conclure, il faut souligner que, si au fil des saisons, les audiences s’éroderont progressivement aux Etats-Unis, ce sont les excellents retours critiques quant à celle-ci qui lui permettront de rester tout de même à l’antenne de 1998 à 2002.
